C’était il y a dix ans, mais monsieur Budras s’en rappelle bien des inondations de 1997, lui qui habite près de l’embouchure de la Neisse et avait fait reconstruire sa maison en 1996 pour l’agrandir à la taille de sa famille. « L’Oder a toujours eu des hauts et des bas », me raconte-t-il. « En 1930, en 1947 et la Neisse en 1958. Mais rien de comparable avec 1997. » Il m’explique que normalement, le niveau des deux cours d’eau n’augmente pas en même temps à Ratzdorf, que la Neisse, plus rapide, précède toujours l’Oder, plus large et méandreuse, et qu’ainsi le niveau de l’eau s’autorégule de soi-même. Mas en 1997, ce fut toute une autre histoire. Les inondations du siècle, comme le mentionne le petit recueil que Katrin m’avait remis la veille. Les deux dépressions « Xolska » et « Zoe » se sont rencontrées non loin de là où l’Oder prend sa source et y ont déversé quelque 50 à 70 litres d’eau par mètre carré. Même une nature intacte n’aurait probablement pas empêché la catastrophe. « En République Tchèque, dans les montagnes Riesengebirge où il a plu, beaucoup de forêts ont été dévastées, victimes des pluies acides issues des usines chimiques. Mais je ne pense pas que les arbres auraient réussi à absorber toute l’eau en 1997. » Mi-juillet, la petite maison au milieu de l’eau qui affiche le niveau de l’eau ne cesse d’afficher un niveau plus haut. 6,09 mètres au lieu d’une moyenne de 2,50 mètres : le 17 juillet, les villageois commencent à vraiment se faire du soucis. Le niveau n’a pas l’air de vouloir baisser. La maison de la famille Budras a déjà les pieds dans l’eau. « Il n’y a pas de digue à Ratzdorf parce que jusqu’à la fin des années 50, les bateaux s’arrêtaient ici pour être réparés au chantier naval du village. » Et de m’expliquer en passant l’histoire de Ratzdorf, village de plus de 750 ans. « La commune dépendait du couvent de Neuzelle, à une dizaine de kilomètres d’ici, et se composait d’un mélange de mariniers et de fermiers. La pêche jouait un grand rôle et puis, vers 1800, le transport vers Cottbus et Guben des matières premières pour la fabrication de tissus aussi. Jusqu’en 1945. ». Ensuite, comme me l’avait déjà expliqué Katrin la veille, la commune s’est agrandie, accueillant pas mal d’Allemands « de l‘autre côté » ayant dû quitter leur demeure sur ordre des soldats russes. Comme monsieur Budras. Après la guerre, une vingtaine de personnes travaillaient encore au chantier naval du village, là où aujourd’hui des hôtels accueillent les touristes. « Et ici, c’était la maison où le personnel des bateaux passaient la nuit », m’explique monsieur Budras. « C’est la troisième maison construite sur le terrain. La première maison a brûlé et la seconde reconstruite en 1948, toujours pour héberger le personnel des bateaux pendant les réparations, a laissé la place à celle-ci en 1996. Nous avons reconstruit pour pouvoir accueillir toute la famille. » Le terrain appartient aux Budras depuis 1961. Après la fin du chantier naval, les terrains voisins, eux, furent d’abord utilisés pour une coopérative de production agricole, tournant autour du poisson et des vaches. Avant de devenir aujourd’hui des hôtels.
1 Commentaires sur "Manfred Budras et les inondations de 1997"
La nature devient comme l’être humain: elle ne le respecte plus, en réponse à des comportements très souvent irrespectueux à son égard. laisser un commentaire
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