C’est finalement un Hartz IV (pendant du RMI en Allemagne) rencontré dans les rues vides de Küstrin-Kietz qui m’a recueillie après que les pensions du bled ont affiché complet et qu’il m’ait prévenue que le village allait jaser. Qu’importe, me voici dans un nouveau monde, celui de Hans-Joachim qui très vite me présente ses amis du quotidien, les voisins Uwe et Ilona. Ce n’est pas l’hospitalité qui manque ici mais plutôt le manque de perspectives. Uwe et Ilona sont au chômage depuis plus de dix ans. Ils travaillaient pour la compagnie de chemin de fer de l’Allemagne de l’Est, comme beaucoup d’autres dans le coin. Mais avec la réunification, le besoin en matières premières venant de Russie est devenu moins pressant, le trafic ferroviaire s’est réduit et l’entreprise reprise par la Deutsche Bahn de l’Ouest fut restructurée. Depuis, régime Hartz IV. Le loyer est pris en charge et chacun reçoit environ 350 euros. Pas facile. Hans-Joachim est aussi Hartz IV. Maçon de métier, il ne pense plus retravailler. En Allemagne, il ne trouve plus de chantier et en Pologne, même en travaillant le week-end, il ne gagne pas assez pour finir le mois. Le temps des chantiers est donc terminé pour lui aussi. Restent les collègues, Allemands ou Polonais, pour se rappeler du bon vieux temps ! Car pour Hans-Joachim, la frontière ne semble que formalité. L’enfant du pays aujourd’hui cinquantenaire a travaillé, aimé et habité d’un côté comme de l’autre de l’Oder. La région, il la connaît comme sa poche. Et malgré tout, Hans-Joachim se contente de s’occuper de quelques poules, lapins et d’un peu de jardin pour améliorer et rythmer un quotidien bien arrosé avec les voisins. Maintenant, je comprends l’aversion pour l’alcool de personnes rencontrées plus au sud. Sous couvert d’adoucir le quotidien, il endort les esprits et engloutit les uns et les autres, faisant oublier à chacun la personne qui se cachait derrière.
2 Commentaires sur "En pension complète chez des Hartz IV de Kietz"
L’alcoolisme crée beaucoup plus de problèmes sociaux et de santé que ce que la majorité des consommateurs croit. C’est le premier facteur de marginalisation, en terme de pourcentage. Cependant parmi ces “surconsommateurs”, certains sont des gens extraordinaires et débordent d’humanité. laisser un commentaire
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